Le costume étant choisi, la chemise et la cravate aussi, ma mère s’enquit à nouveau des délais. Le vendeur répondit aussitôt :
- « Pi de problème. Ty pars manger, ty reviens et le costume y sera prêt !
- Et le délai de 4 semaines ? m’étonnai-je aussitôt,
- Comme ty l’prends tout suite, y a pas délai ! »
Quel excellent vendeur ! Il m’a bien entu… euh… bluffé !
Nous ayant à sa merci, il ajouta : « Par contre, si ty vas manger, j’ty conseille un restau au coin de la rue. Si l’plus propre du quartier. Ty demandes Bob de la part de Maurice. »
Et c’est ainsi que nous parcourûmes à nouveau le boulevard Magenta, envoyés en mission par Maurice qui nous recommandait !!!
Nous atteignîmes ledit restaurant. Ma mère, la fierté du VIP brillant dans ses deux yeux, s’exclama en rentrant dans l’établissement : « Une table pour deux ! Nous venons de la part de Maurice !» Le patron en personne se précipita : « Aïgaaaa ! vous venez di la part di Mauriice ! J’ty trouve une table ! » Nous le suivîmes dans la salle ; croisant un garçon, il lui souffla dans l’oreille : « Ils viennent de la part de Maurice... » Nous étions donc assurés d’avoir un bon repas.
Une question me vint aussitôt à l’esprit : et si nous n’avions pas été recommandés ? Nous aurait-on refusé ? Notre steak aurait-il été trop cuit (ou pas assez) ? Je n’osais y penser. Néanmoins nous étions dans la place, deux agents doubles - faisant donc un quadruplé d’espions - dans Magenta !
Nous mangeâmes bien et fûmes bien servis, sans nous laisser démasquer. Quand soudain, à la table voisine, un homme sortit une cigarette. « Aïe Aïe Aïe ! ma mèèèèère, elle supporte pas li cigarette. » Je hélai le serveur pour le menacer l’avertir. Nous étions recommandés par Maurice quand même ! Le patron affolé arriva (en courant) : « Aïe Aïe Aïe. Nous n’avons pas di ventilation et pas di zone non-fimeur. Mais jy peux vous mettre près de li porte. »
On nous changea donc aussitôt de place, assiettes et verres compris (C’est vraiment la classe d’être recommandé par Maurice…).
Puis ma mèèèèèère voulut aller aux toilettes. Mais voilà, pour y accéder, il fallait 50 cents ! Et ma mèèèère n’avait qu’une pièce de 2 euros. Elle appela donc le patron, après tout, nous étions recommandés par Maurice (il faut le dire) et le questionna :
« Vous auriez la monnaie pour aller aux toilettes ?
- Aïe Aïe Aïe ! ma mèèèèère…. (heu… mais non… c’est la mienne de mèèèèère !?!) ty va pas payer les toilettes dans mon ristaurant quand même ! Jy vais ty donner un jeton, moi ! ». Derechef, elle obtint le fameux sésame jeton, qui n’était rien d’autre qu’une simple pièce de 50 cents.
Bref, cependant que les doigts agiles du couturier retouchaient mon costume, nous mangeâmes, bûmes et utilisâmes les commodités chez un Bob qui avait les meilleures intentions pour nous, tout cela grâce à la bénédiction Maurice…